Monday, April 05, 2010
Le guerrier solitaire / Valhalla Rising de Nicolas Winding Refn (2010)
Pour une fois, la traduction française d'un titre de film sera tombé juste. Valhalla Rising, vendu dans notre pays sous le nom du Guerrier Silencieux ne ment pas sur la teneur du produit. Centré sur un guerrier que l'on nomme Le Borgne (Mads Mikkelsen qui était déjà dans Pusher 1 et 2 ainsi que dans le rôle du grand méchant machiavélique dans Casino Royale), ce voyage jusqu'en terre sainte pour un groupe de guerrier venu chercher gloire pour leur dieu et richesse pour eux étouffe les doutes que l'on pouvait encore avoir sur le talent du réalisateur danois Nicolas Winding Refn. De même, la prestation de Mikkelsen dans son rôle de guerrier est magistrale puisqu'il ne souffle mot durant le film et laisse le film se reposer sur la qualité de son interprétation physique.
Ainsi, à l'instar de ce personnage silencieux dont toute la "communication" passe par l'action et non par le verbe, il est pratiquement impossible de raconter ce film sans décrire une scène. Winding Refn étouffe ses personnages sous le poids de la nature environnante. Que ce soit sur les terres nordiques exsangue, l'océan brumeux ou une forêt rayonnante de verdure, l'environnement domine les guerriers dont les armes sont futiles, autant face à leur territoire que face à ce guerrier faisant preuve d'une violence inouï.
Celle-ci est par ailleurs souligné par le caractère du Borgne qui ne laisse filtrer que peu d'émotion. D'abord enragé contre ses esclavagistes, il ne déchaine ensuite sa foudre que par réaction et ne cherche plus le conflit. L'humanité que l'on voulait lui prêter en le voyant étriper et fendre la chaire est remplacé par une animalité presque plus saine que la violence qu'exerce les croisés contre leurs ennemis au nom d'un Dieu qui les a indiscutablement abandonné tout au long d'une route qui les amènera vers l'enfer.
L'enfer est d'ailleurs le titre du sixième chapitre de ce film, découpé tel un roman par des titres et des numéros. Cette technique souligne les différents actes du film afin de clarifier son déroulement pour le spectateur, pris dans un enchainement de plan fondus et enchainé et de répliques chargés de plusieurs niveaux de lectures. Toutefois, tout comme dans There will be blood, l'atmosphère constante maintient la tension et l'attention jusqu'à la "conclusion" de cette histoire. La nature domine tout et lui résister n'est que futilité.
A l'opposé de la mentalité de la culture black metal norvégienne que certains thème souligné dans la bande annonce pouvaient évoquer (un guerrier seul contre tous, des chrétiens perdus en enfer, la culture viking), Valhalla Rising écarte toute ressemblance avec les groupes d'adolescent norvégien qui ont terrifié le pays en s'inspirant du heavy metal satanique grossier des anglais de Venom. Le Borgne n'est pas seul contre tous, il ne fait qu'un avec la nature et connait ses forces et ses faiblesses face à elle. Si la chrétienté est tourné en dérision, c'est aussi le cas de toutes les croyances ou les histoires que peuvent inventer les personnages tout au long du film sur leur destin. Qui est responsable? Qui est véritablement maudit? Tout cela n'a aucune espèce d'importance et toute tentative de faire sens est futile. Ni la culture viking ou la chrétienté n'est épargné. Ne reste que l'immensité des paysages superbes que Nicolas Winding Refn emploie avec force et intelligence.
A l'issu de ce film il ne reste donc qu'un seul constat à faire : Nicolas Winding Refn règne en maître et personne ne pourra plus l'ignorer (bien que cela était déjà bien difficile après la trilogie Pusher et le génial Bronson). Une seule ombre au tableau : il lui faudra maintenant réaliser un film à la hauteur de ce chef d'œuvre.
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