Tuesday, August 31, 2010

Satoshi Kon, l'homme qui avait trouvé le chemin jusqu'au monde des rêves


Satoshi Kon est décédé le 24 aout 2010. C'était l'un des créateurs les plus brillants de l'animation japonaise. Il nous laisse des chefs d'oeuvres, de pures merveilles d'enchantement des yeux et de l'esprit. Paprika, Tokyo Godfathers, Perfect Blue, Millenium Actress et une série d'exception, Paranoïa Agent.

Plutôt que de faire une eulogie qui ne rentrerait pas suffisamment dans le détail de son œuvre, je préfère me concentrer sur cette série que j'ai visionné en intégralité il y a quelque mois. Trouver un coffret DVD me pris du temps, après avoir malheureusement laissé passer l'occasion d'en acheter quand l'occasion se présentait à sa sortie. Depuis, j'avais scruté les rayons et attendus jusqu'à ce qu'un beau jour, je puisse me précipiter sur celui-ci et contenter ma patience qui fut récompenser au centuples.

Tsukiko Sagi subit l'envie de ses collègues pour avoir créer un personnage très populaire pour le studio d'animation où elle travaille. Une petite peluche rose, mignonne, souriante comme sous l'effet d'une extase innocente illimité. Un soir, en rentrant chez elle, elle trouve sur son chemin un jeune garçon. Un jeune garçon sur des rollers portant une batte de baseball. Il la course, la frappe et fait d'elle la première victime de ce que la presse commence a appeler l'affaire du Gamin à la batte.

Une enquête commence alors pour trouver l'identité de ce gamin dont les victimes s'accumulent. A chaque épisode une nouvelle personne tombe sous le coup de sa vengeance, de sa mission, inexplicable. Quel est le lien? Qu'ont toutes ces personnes en communs. Ces victimes, le spectateur les découvre à chaque nouvelle épisode. Un petit microcosme se développe alors en vingt minutes et donne naissance à une nouvelle part de réalité qui, une fois assemblé, constitue l'univers de Paranoïa Agent.

Celui nous le découvrons aussi par le biais du générique. Un petit moment de télévision et d'animation unique que celui-ci. Aussi fascinante et inquiétant que le générique de Twin Peaks, au décors forestier typique des séries à fleuve, dont le mystère est souligné par la musique d'Angelo Badalamenti. Durant ce générique, les personnages principaux apparaissent successivement au milieu de la circulation, au sommet d'une tour, d'une montage, et rient. Ils rient la gorge déployé. Le genre de rire que l'on laisse éclater quand on se trouve dans une situation tellement dangereuse, tellement tragique, tellement inquiétante, que l'on ne peut plus s'abandonner aux larmes, préférant une dernière jouissance avant l'inéluctable.

En treize épisodes, Satoshi Kon développe des thèmes qui lui sont chères comme la force de l'esprit et l'onirisme. A l'aube de sa disparition, certains commentateurs citaient Paranoïa Agent comme une inspiration possible d'Inception, le dernier film de Christopher Nolan, ou tout du moins une œuvre sœur. Toutefois, de ce que je sais du film, rien dedans ne vous préparera réellement au chef de complexité tissé par l'auteur par la toile des liens entre ses personnages a qui il donne une existence pour laquelle on se passionne au fil de ces petites vingtaines de minutes.

Le Roi est mort, vive le Roi. On parlera encore de son travail pendant longtemps. Peut être même que son dernier film, The Dreaming machine, projet que le cancer ne l'aura pas laissé terminer, trouvera une conclusion entre les mains du studio responsable de sa production. Quoi qu'il en soit, Satoshi Kon était un créateur unique disparu bien trop tôt en laissant une galerie d'œuvre essentiel que l'on espérait voir s'enrichir encore pendant des dizaines d'années. Un commentateur, Jeff Betteridge, résumait la disparition de l'auteur pour le monde de l'animation comme un signe que rien ne sera plus jamais pareille car tout se ressemblera de plus en plus. Lumière d'inspiration pour tous à travers l'univers de l'animation, et au delà, Satoshi Kon a influencer et continuera de marquer l'esprit des créateurs. Bien sûr, d'autres viendront, avec leurs voix et une part des rêves de l'homme. Lui en revanche n'est plus et l'imaginaire vient de perdre un de ses héros.

Saturday, August 21, 2010

Give me Martha Washingtown au vingtième siècle


Avant Sin City et entre 300, Frank Miller créa avec Dave Gibbons, dessinateur et co-créateur des Watchmen avec Alan Moore (ça va, vous êtes attentif), le personnage de Martha Washingtown. Une enfant unique dans le monde de la bande dessinée américaine a plus d'un titre. Une femme, noire, pauvre, prisonnière d'un système totalitaire futuriste.

Une petit fille qui deviendra femme et guerrière pour l'idéal de liberté qu'elle désire tant et qu'on lui vole constamment. Que ce soit le gouvernement corrompu, les militaires qui le sont tout autant, Martha ne peut croire qu'en elle-même. La force de caractère anime l'enfant forcé à se défendre violemment dès son plus jeune âge contre des agressions de toute sorte. Très vite parqué d'un ghetto à une institution psychiatrique, elle s'inscrit ensuite dans la force armée, Pax, pour y rencontrer son nemesis, un jeune officier corrompu qui fera tout ce qui est en son pouvoir pour prendre le contrôle des Etats-Unis des mains de politiciens dans les mains de qui le monde glisse déjà dangereusement vers le chaos. D'une nouvelle guerre de sécession viendra le début d'une nouvelle ère pour Martha Washingtown, regroupé aujourd'hui dans un seul volume de 600 pages.

Dave Gibbons introduit chaque histoire et explique le processus créatif et les raisons du retour des auteurs à ce personnage qui les aura suivis de la fin des années 80 jusqu'en 2006. Le temps pour les auteurs de franchir le pas entre l'univers de science fiction qu'ils ont crée et de voir se réaliser, d'une certaine manière, le changement politique qu'ils avaient prévus en décrivant une Amérique en guerre à travers le monde au main d'un président paternaliste, remplacé, ici après un attentat, par un idéaliste d'abord acclamé puis sévèrement critiqué.

Ceci étant, le futur Orwelien de Miller, même si il affronte des menaces écologiques contemporaines, plonge dans une violence quotidienne et un sens de la propagande caricaturale qui ne dépeint pas de façon réaliste les véritables mensonges de notre époque. La première longue aventure de Martha Washingtown Give me liberty, est celle d'une héroïne prise dans une machination politique destiné à a dénoncer les travers de notre époque.

Par la suite, le personnage, toujours aussi héroïque, met cette engagement de côté pour devenir une héroïne d'aventure grandiloquente, avec comme toujours comme thématique sous-jacente le combat d'une personne contre une pensée collective totalitaire. Le schéma manichéen, cher à la philosophie objectiviste d' Ayn Rand que Miller crédite comme une influence pour l'écriture du second grand chapitre de la vie de Martha Washingtown, Goes to War.

L'enfant malmené des premières histoires s'affirme comme une guerrière prête à tout les défis et son histoire prend ensuite des détours encore plus incroyable, à l'image d'une autre influence majeur, Jack Kirby. L'influence du King du comics américain se ressent surtout à mesure que l'histoire fait des sauts incroyable en très peu de page pour que finalement Martha Washingtown soit chargé de sauver le monde dans l'avant-dernier chapitre de sa vie.

Les dialogues apparaissent alors encore plus clairement comme le grand point faible de Miller, qu'il dépense toutefois admirablement grâce à une inventivité sans repos emprunté aussi au King Kirby. Lire la vie de Martha Washingtown au vingt et unième siècle permet de faire le lien entre le comics de super héros et la littérature engagé, avec un emprunt rapide à la philosophie de droite d'Aynd Rand dans un grand melting qui, malgré tout, suis une trajectoire aussi déroutante que passionnante.

Il faut pour cela remercier Dave Gibbons, illustrateur, porteur de l'allumette de vie d'un univers bariolé dont le talent pour dessiner l'une des bandes dessinées les plus importante de l'histoire (Watchmen) ne démérite pas sur ce classique moins illustre et toutefois des plus mémorable. Un auteur au personnage toujours aussi possédé par leur soif de justice rencontre l'un des traits les plus iconique de la bande dessinée mature des années 90, cela ne pouvait que produire une histoire incroyable.

Monday, August 16, 2010

Harvey Birdman, l'avocat des toons


Pendant que Cartoon Network, une chaine américaine diffusant des dessins animés destinés aux plus jeunes, occupe l'antenne en journée et durant l'après-midi, les soirées sont réservés à Adult Swim, le versant adulte de la chaine. Des dessins animés japonais, ainsi que des productions maisons, y sont diffusés pour un public un poil plus agé (wikipedia me dit de 14 à 18 ans mais si vous êtes plus vieux vous pouvez y aller aussi). Robot Chicken, une série parodiant, sous la forme de courtes séquences des dessins animés, des séries et des films (crée par Seth Green, le rouquin loup garous dans Buffy); Aqua Teen Hunger Force, les aventures d'une boule de viande, d'une boite de frite et d'un milk shake parlant et de leur voisin redneck (oui, cette série existe vraiment) et Metalocalypse, racontant le quotidien déjanté du groupe de rock le plus populaire au monde; sont les séries les plus populaires de la chaine.

Harvey Birdman, Attorney at law, est aussi l'une de ses production. Elle raconte les aventures d'un ancien personnage crée par les studios Hanna-Barbera dans les années 60, un super héros doté d'ailes et d'un masque de faucon, accompagné de son fidèle acolyte, un véritable faucon. Des années plus tard, il décide de mettre fin à sa carrière et de devenir avocat (les raisons sont expliqués dans un épisode que je n'ai pas encore regardés). Son accolyte devient alors son assistant chargé de taper à la machine ses conversations, avec son bec, et de faire des recherches dans le cadre des affaires qu'il doit défendre.

Ses affaires concernent généralement d'autres personnages de la même époque, comme Sammy et Scoobidoo quand ils sont arrêtés par la police pour suspicion de possession de marijuana, Fred Pierrafeu quand ils est accusés d'être parrain de la mafia locale (l'épisode est une parodie des Sopranos) ou Apache Chief, un indien capable du pouvoir de devenir un géant qui se voit privé de ses pouvoirs quand un serveuse lui renverse du café brulant sur ses parties.

La galerie de personnage pioche dans tout les tiroirs et mélange les univers de façon a parodier de la manière la plus absurde et dingue tout ce qui lui passe sous la main. La cohérence n'est pas une des grande qualité de la série tout en étant sa plus grande force grâce à un humour incroyablement débridés. Le point commun entre tout les personnages semble être la folie qui les possède.

Mentok, The Mind Taker, ancien ennemi juré de Harvey Birdman dans sa première série, devenu juge dans celle-ci, s'ennuie des procès qu'ils préside car il prédit toujours le verdict au début.
Peanut, le greffier d'Harvey, s'exprime parfois dans des langues choisit au hasard, et s'occupe de tout, sauf faire son travail, comme de construire une boule a pique géante dans le bureau qui se balance de droite à gauche. Celle-ci frappe différents personnages durant l'épisode en question, parfois même alors que la scène ne se déroule pas dans le bureau.
Enfin, le patron d'Harvey, Phil Ken Sebben, indique toujours des direction inverse quand il pointe une direction du doigt, est atteint d'une dyslexie compulsive quand il parle et finit ses phrases par des mots étranges. Il est doublé par le comédien Stephen Colbert du fameux Colbert Report (un autre monument actuel de la télévision américaine en ce qui me concerne).

Des dizaines d'autres personnages interviennent en fonction des épisodes, des affaires et des situations toutes plus folles les unes que les autres dans laquelle se retrouve l'équipe de notre super héros avocat à tête d'aigle. La série compte quatre saisons et pour en avoir vu seulement la première (les épisodes durent dix minutes, la saison en compte onze et j'ai tout regardé en une journée), la folie va de manière croissante, avec comme sommet "SPF" où Harvey développe une addiction à la crème solaire, et X-The Exterminator où le personnage titre tente de tuer Harvey alors qu'il tente de défendre son propre patron qui est accusé d'avoir effectivement écrasé un passant chaque jour de la semaine.

Malheureusement, les extraits de la série disponible sur youtube ou sur le site d'Adult Swim ne sont pas visionnables, à moins d'utiliser un proxy vous localisant ailleurs qu'en France (aux Etats-Unis, par exemple). De plus, la série n'est sous-titré qu'en anglais. En revanche, les trois saisons sont disponibles en coffret sur un fameux site de commande à distance pour une somme modique. Sinon, il y a toujours d'autres solution... j'imagine.... De nos jours, aucun obstacle ne peut décemment vous empêcher de vous procurer cette série et elle le mérite amplement quand on a vécu avec Scoobidoo, les Pierrafeu ou les Fous du Volant et que l'on s'est toujours douté qu'il y avait quelque chose derrière cette obsession de Sammy pour la nourriture et cette démarche pataude.


(deuxième partie du premier épisode de la saison 1, Bannon custody battle, une parodie du dessin animé Johnny Quest)

Monday, August 09, 2010

Old Man Logan - L'age n'atteint pas la rage du héros

Wolverine (ou Serval, comme on l'appelait dans les comics Marvel publié en France). Mettez le sur une couverture et regardé votre chiffre de vente grimper tout seul.
C'est un fait avéré, connu de tout les scénaristes et éditeurs de comics que Wolverine + Couverture = Vente. Pas de 35H, pas de RTT, pas de repos, le type court dans tout les sens alors il faut bien qu'à un moment il fatigue, il vieillisse... et avec lui tout l'univers Marvel.

Old Man Logan, histoire crée par Mark Millar (Nemesis, Kick-Ass, Civil War) et Steve McNiven (Civil War, Nemesis) vous explique en quoi la présence de Wolverine sur toutes ces couvertures était nécessaire. Car, non seulement sans lui vous n'auriez pas lu les aventures de nombreux héros dont vous n'aviez rien à faire, mais en plus, sans lui le monde entier serait perdu. A la retraite, fatigué, marié avec deux enfants, Logan, notre très cher Wolverine, n'en peut plus de la violence qui a consumé le monde entier.

Il a fallu un moment d'illumination diabolique pour que les super criminels du monde entier se décide à se liguer tous ensemble contre les super héros afin de dominer le monde. L'idée avait déjà été employé par Millar dans Wanted, dont l'adaptation cinématographique a vu son scénario plus qu'un peu modifié, avec le même résultat, à l'exception que les super héros de Wanted n'était pas des icônes avec qui l'on a pu vivre des dizaines d'aventures. Alors que Wanted célèbre la victoire des criminels contre les héros avec cynisme, Old Man Logan plonge d'emblée le lecteur dans un univers désolé et abandonné par l'espoir de voir un jour régner un peu d'ordre.

Lui même désabusé, Logan se refuse à la violence dont il faisait preuve auparavant et est contraint d'accompagner son vieux compagnon Quicksilver pour gagner de l'argent et empêcher sa famille se de faire tuer par un gang de monstre héritier des gènes de Hulk. Le road movie leur fait parcourir les Etats-Unis, son histoire et ses tragédies. Sa violence aussi, car là où règne le mal absolut, la folie règne sans partage.

Une aventure que l'on peut rapprocher de l'Age d'Apocalypse dans ses moments les plus tragique. La violence de certaines scènes dépassent toutefois largement ce que l'on peut voir communément dans une histoire de super héros habituel tant le sang coule parfois à flot et les crocs de certains monstres sont bien plus assurés. Ainsi, bien que l'univers Marvel ai déjà traversé de nombreux apocalypse, celui-ci est le plus crue et le plus amer qui a surement jamais été écrit.

Les coups de théatre se succède à chaque numéro et plonge de plus en plus notre héros dans l'horreur jusqu'à atteindre le point de non retour. La réaction de Logan, le lecteur s'en doute, mais jusqu'à quel point celui-ci résistera t'il? Et que décidera t'il de faire une fois que le fameux bruit de l'extraction de ces griffes aura retenti après tant d'année?

Sunday, August 01, 2010

The Invincible Iron Man Annual #01 - Quand la fiction rejoint la réalité


Alors que le destin d'Iron Man se dénoue de nouveau dans sa série régulière, The Invincible Iron Man, et que le succès des films rend le personnage plus populaire que jamais, ce annuel permet à Matt Fraction, scénariste régulier de la série depuis plus de deux ans, de prendre le temps de raconter une histoire n'ayant aucun rapport avec la continuité des évènements de la vie du héros titre.

Le "héros" de ce numéro spécial est le Mandarin. Un despote chinois accoutumé à affronter Iron Man et Tony Stark depuis des années. L'univers de ce dernier est peuplé de nemesis dont l'égo, le génie ou la fortune les ont opposés aux multiples talent de Stark. Tortionnaire ridicule dont la vie n'est conté que quand il affronte son ennemi juré, il kidnappe ici un réalisateur de génie pour raconter l'histoire de sa vie. Contraint par la menace de la mort de son épouse, il se met à la tache et écoute le Mandarin raconté sa vie, ses aventures; des mensonges qu'il invente pour satisfaire le plaisir de se voir incarner à l'écran sous un angle favorable.

Si la situation n'était pas dramatique pour le réalisateur, l'histoire en serait ridicule. Ce que Matt Fraction tire toutefois de cette histoire n'est pas une occasion de se moquer de ce maître du mal mais lui donner un contexte plus réaliste proche de la folie dévorante des criminels de guerre qui gouverne encore à l'heure actuel des pays et exerce par la force tout leurs caprices. Le Mandarin se sert du pouvoir conférer par ses anneaux. D'autres usent de leurs soldats pour obtenir ce qu'ils désirent.

L'importance d'Iron Man dans cette histoire en devient même anecdotique car seul compte la volonté de l'équipe de tournage face aux mensonges et au bon vouloir du Mandarin. Sous couvert d'une histoire de super héros, tout comme dans la série The Invincible Iron Man, Matt Fraction traite de problématiques réels comme le transformation de notre économie pour s'adapter au développement durable, la propagation d'armes de destructions massives aux mains de groupuscules, la libre circulation de la technologie et ses applications à des fins belliqueuse ou pour améliorer le monde, et nous plonge dans le quotidien d'un tortionnaire pour qui le monde ne tourne qu'autour de lui. En 61 pages, la fiction n'a pas le temps de dépasser la réalité, juste de donner un aperçu d'un petit bout d'une partie de l'univers de papier que l'on a pas pour habitude de connaitre afin de révéler une part de ce qu'ont en commun les tyrans et les super vilains ont en commun, la folie de leur égocentrisme.