Saturday, June 26, 2010

Stranges Tales de Various artists (Marvel)


La plupart des recueils d'histoires courtes que j'ai acheté, jusqu'à présent, m'ont toujours un peu déçu. Les auteurs les plus connus se retrouvent en première ligne et sont généralement les plus satisfaisant. Quand aux découvertes de jeunes pousses prometteuses, elles sont rares. Beaucoup de remplissages avec des histoires trop familières et des graphismes approximatifs ou beaucoup trop influencés. Le pire souvent que j'ai vient d'un volume autour de la musique dont la plupart des auteurs avaient une vision nostalgique et ennuyeuse de la musique, une attitude que j'exècre tout particulièrement en matière de musique! Strange Tales part en revanche avec un appriori positif de par la liste plus que conséquente de noms familiers du milieu indépendant que l'on retrouve. Des vingt sept auteurs, seulement neuf ne m'évoquent rien à la lecture de leur biographie.

Pour cause, difficile d'ignorer le talent de Paul Pope (100%, Heavy Liquid, Batman 100), Stan Sakai (Uzagi Yujimbo), Peter Bagge (Hate) ou Nicholas Gurewitch, dont toutes personne ayant un tant soit peut trainé sur internet a forcemment rencontré au moins une fois un strip de la fameuse Perry Bible Fellowship. Des références n'ayant que peu ou jamais (à l'exception de Jonathan Hickman, signé à temps plein) travaillé pour Marvel ou avec ses personnages.

Leurs interprétations des personnages de l'éditeur, des X-Mens à MODOK jusqu'à Captain America et Dr Voodo ne souffrent d'aucune préoccupation éditoriale (respecté la continuité, faire avec les récents évènements polito super héroïque). Chacun parodie ou s'approprie les déboires des héros mais pratiquement tous se retranchent sur le mode de narration rapide et remplis de rebondissement des débuts. Même Peter Bagge, tout aussi habile pour la caricature dans son trait de crayon que dans ses bulles, se réapproprie le mythe de Spiderman pour en faire un héros Ditkoesque consumé par des préoccupations Randienne (voir le reportage sur la vie de Steve Ditko pour plus de détails).

Strange Tales caricature mais avec un plaisir non dissimulé sans se moquer des poncifs mais en se les réappropriant à leur manière. La quête désespéré du chien des Inhumains pour un ouvre boite à tout de l'humour des histoires comiques de Paul Pope (un genre dans lequel il s'illustre rarement mais toujours avec beaucoup d'efficacité, voir El Enmascararad Karimbah! dans l'artbook PulpHope). Le Iron Man de Tony Millionnaire (Sock monkey), au prise avec deux saucisses humaines est gorgé de jeu de mot. Quand au Hulk de Stan Sakai, il se retrouve naturellement au Japon parmi les Samouraï.

Les ratés, ou plutôt les imperfections sont rares. Le Spiderman de Junko Mizuno, fidèle à son style, se déroule de manière très bancale et approximative. L'homme araignée et le shoujo manga ne vont tout simplement pas de paire. En revanche, les deux histoires sur le fantastique et ridicule MODOK (Mental Organism Design Only for Killing) démontrent parfaitement le potentiel comique du personnage, concentré ultime de la folie démoniaque et grotesque des super vilains de l'age d'or des super héros quand ils étaient encore dessinés par Jack Kirby. Cependant, à l'image du King Kirby, Strange Tales déborde d'imagination et d'enthousiasme pour les aventures de ces personnages que chacun ne cesse de se réapproprier.

Une parfaite démonstration de tout ceux que le milieu indépendant peut apporter aux super héros et de l'inventivité de ceux-ci par rapport aux clichés fatigués dans lesquels sont souvent tombés des séries, ceinturés par le poids des demandes des fans et des licences qu'ils représentent. Vous ne verrez jamais à l'écran le Punisher contraindre un étudiant a faire ses devoirs mais vous pouvez heureusement en profiter dans ce volume.

Sixteen miles to Merricks and other works de Barnaby Ward


Les afficionados du flux d'image FFFFound ont surement vu passer de nombreuses illustrations de Barnaby Ward extraite de son site, Somefield.com. L'artiste semble beaucoup plus reconnu pour ces œuvres individuels représentant de jeunes femmes accompagnés d'animaux de toute sorte. des illustrations qui ne dévoilent qu'une part infime de l'univers graphique de l'auteur tel qu'il est développé dans Sixteen miles to Merricks (and other works). Le présent recueil de trois courtes histoires, une longue et de diverses illustrations (dont certaines tirés de son projet personnel, et inachevé, inspiré par Alice au Pays des Merveilles) présente un jeune auteur au style affirmé et aux scénarios fantastico onirique présentant tout les symptomes d'un artiste compétant graphiquement mais encore maladroit pour exprimer ses idées.

Les couloirs interminables et les bribes de discussions des deux protagonistes de l'histoire titre ne sont pas sans rappelés les déboires de Killy à travers l'univers de Blame! A la diférence de son auteur, Tsumoto Nihei, Barnaby Ward résout plus rapidement son intrigue et explique partiellement le sens de cette aventure. Reste toutefois en suspend bon nombre de question à la dernière case et l'on ressent une part d'inachevé une fois la page tourné vers des interprétations par d'autres artistes des protagonistes. Ceux-ci auraient encore beaucoup à dire derrière les tatouages recouvrant les bras du jeune homme, les raisons de leur présence sur l'ile, sa nature même et enfin, la dualité entre la personnalité de jeune femme enthousiaste et amoureuse et celle de fil d'Ariane de l'héroïne.

Les histoires suivantes, d'autant plus courte, laisse encore beaucoup de points d'interrogations entre le peu de dialogue et la richesse des planches. Les designs robotiques et l'obsession pour les héroïnes courte vêtu de l'auteur rappelle aussi le travail d'Ashley Wood. Toutefois, contrairement à l'auteur de Popbot, Lore, Automatic Kafka et tant d'autres séries inachevés, l'influence de la narration japonaise propre au manga (ainsi que cette approche narrative centré sur des tranches de vie et non des épopées), les points de vue très variés des cases orientent très efficacement le lecteur et rendent ce parcours, aussi étrange soit-il, très prenant, tout autant que le design à la fois mécanique et organique de son univers (le robot géant de Rooftops semble être fait de bois).

Comme perdu au sein d'un futur post apocalyptique qui se redécouvre intégralement, les personnages de Barnaby Ward n'apporte que peu d'aide au lecteur car ils sont tout aussi perdu que lui. Entre les univers de Nausica et de Blame!, Barnaby Ward extrait un compromis entre un trait américain tiré par une conception scénaristique japonaise et une envie d'expérimenter avec tout. Un style personnel s'affirme ainsi que des imperfections heureusement comblé par un graphisme envoutant qu'un scénariste compétant saura surement dirigé efficacement dans de prochain travaux.

Sunday, June 20, 2010

Smoke - Sous la fumée, le brouillard


Il fut une époque, vers la fin des années 80, où l'Angleterre était le berceau de nombreux scénaristes de bande dessiné aux opinions politiques bien apparentes. L'époque d'Alan Moore et John Wagner. Autour de la même époque, aux Etats-Unis, un scénariste de comics appelé Frank Miller publiait aussi des histoires qui marquèrent l'imagination des scénaristes. V pour Vendetta, Judge Dredd et Martha Washingtown goes to war sont tous des références impériales dans l'univers de la bande dessinée anglo-saxonnes et Smoke est à la fois tributaire de celle-ci et digne de la comparaison.

Caïn, un tueur a gage à la solde du gouvernement anglais, apprend que son mentor a été tué lors d'un cambriolage. Une explication qui ne lui convient pas et l'amène a enquêter. Pendant ce temps, l'Angleterre vit des heures douloureuses, emprunt à une récession économique et à une crise pétrolière majeur. Les manigances politiques vont bon train et rien n'est assez dangereux pour remettre le pays à flot. Les années noirs de Margaret Thatcher que dénonçait Moore dans V pour Vendetta ne sont plus. Le jeu de l'argent et du pouvoir va toutefois toujours bon train et sert de moteur à ce thriller politique complet et complexe où un tueur à gage et une journaliste vont se liguer pour connaitre la vérité. Alors que, finalement, qui s'y intéresse vraiment?

Tout aussi influencé par ces même héros susmentionnés, Igor Kordey, dessinateur populaire grâce à son passage au côté de Grant Morrison sur New X-Men, est tout aussi influencé par ces mêmes œuvres. La patte d'un Dave Gibbons (Watchmen) est perceptible dans son train minutieux et réaliste, de même que celle d'un Steve Dillon (Preacher). En fait, Smoke aurait pu être publié chez Vertigo mais est arrivé entre les mains de l'indépendant IDW. Signe des temps où certaines des meilleurs séries du mythique éditeur de Preacher, the Invisibles ou Sandman est obligé de mettre un terme à ses titres les plus prometteurs (Unknown Soldier, The Exterminators, Young Liars ...)? Smoke ne tient toutefois qu'en quelque numéros compilés dans un seul volume.

Plein de cynisme, de degré de lecture et de petits détails dissimulés dans des extrait d'article placé entre les chapitre ou de publicité discrètement placé dans des cases. Alex de Campi est allé à bonne école mais imite bien, sans que la référence soit trop envahissante, les petites manies d'Alan Moore a vouloir donner au lecteur toujours plus qu'il ne voit à la première lecture. Le final est donc un peu expéditif après un tel déballage de complot mais laisse la porte ouverte à une nouvelle exploration plus attentive. Actuellement, ces deux auteurs ne produisent rien de notable dans l'univers de la bande dessinée et c'est bien regrettable tant celui-ci manque d'auteurs engagés et passionnés comme ceux-la.

Chew - Laisse moi te croquer et je te dirais qui tu es


Il faut manger pour vivre et non vivre pour manger disait Rabelais par la bouche de Gargantua. Dans le monde de Tony Chu, il faut manger pour enquêter et non enquêter pour manger. Manger ça le dégoutte. Une bouchée d'un aliment lui fait vivre tout ce que le légume, le fruit ou l'animal a vécu. Une capacité bien pratique quand on est enquêteur et qui va le projeter au sein du bureau fédéral d'investigation des aliments et des médicaments (F.D.A.) en tant qu'inspecteur des meurtres et autres affaires liés à la nourriture.

"It's a sad fact, and an awful truth. Sometimes in the course of this job, you're going to eat terrible things, all in the name of justice."
- Mason Savoy

Savoy, son partenaire, expérimenté dans l'art de l'inspection alimentaire, l'accompagne dans ses premières enquêtes, d'Antarctique jusque dans les cuisines de restaurant où l'on prépare du poulet. Met hors la loi depuis la mort par millions de victimes d'une épidémie de grippe affectant ces volatiles. Conspiration ou danger réel? La question est abordé tout au long de ce premier volume mais reste en suspend. Les six chapitre de Taster's choice introduise les différents personnages, l'univers et les capacités de Tony Chu et de son partenaire et mentor. Un mélange de rouage bien huilé propre au série policière et d'originalité des intrigues.

Chew ne se sert pas de l'alimentation comme un gimmick mais d'un ressort scénaristique propre exploité à tout les degrés de la création de son univers. John Layman, scénariste et créateur, fait de la nourriture le centre d'intérêt de chacun. On trafique le poulet, on consomme des doigts pour trouver des indices, on devient même terroriste pour prouver que la grippe du poulet est le résultat d'une conspiration mondiale. La bouffe c'est sacré et Tony Chu mort les preuves à pleine dedans. Il a faim et soif de justice. Il cuisine les preuves et les témoins... Quand à Rob Guillory, son style emprunt du dynamisme d'un jeune Ted McKeever, associé à une coloration moderne, donne vie à des histoires à mi chemin entre la comédie et le thriller. L'absurde cache une intrigue prenante et mystérieuse dont on ne découvre que des bribes à travers les multiples intrigues auxquels sont confrontés les personnages.

Cette pluralité des directions pour un premier volume est aussi le seul point noir car a trop introduire d'intrigues, Layman et Guillory laisse beaucoup de points d'interrogations que l'on espère voir tous résolu. Layman n'en est pas son coup d'essai dans le medium mais Chew est son titre le plus applaudi par la critique et le public à ce jour, et à juste titre. Rare sont les histoires aussi passionnante pour une équipe aussi jeune dans un univers original. Un succès qui rappelle evidemment celui de Powers, publié par le même éditeur il y a plusieurs années et qui fit de Brian Michael Bendis le scénariste populaire qu'il est aujourd'hui. Il serait toutefois injuste de trop comparer les deux séries car Chew a d'ors et déjà trouver sa propre voix et son originalité parmi les histoires policières les plus efficaces publiés ces dernières années (Powers, Gotham Central, Small Gods ...).